Brobeck Jean-Paul - Un miroir pour trois visages
Histoire pour les enfants sages.

Mon histoire pourrait commencer comme toutes les histoires, par : « il était une fois »…
Mais je préfère dire : « c’était il y a bien longtemps ».

C’était donc, il y a bien longtemps.
On venait tout juste de faire le monde.
On avait fait une terre bien ronde.
Mais quelqu’un fit remarquer que le monde était vide et qu’il fallait inventer.
Inventer quoi dit un autre ?

Alors on inventa les fleurs ? parce qu’un monde sans fleurs c’est comme un homme sans cœur.
On inventa aussi les montagnes, pour grimper tout là-haut pour voir combien le monde est beau.
On inventa beaucoup de ciel bleu et seulement un peu de ciel gris parce qu’on ne peut se passer de la pluie.

On inventa aussi les fruits parce que c’est plein de vitamines les fruits. Puis on inventa les animaux, les petits comme les fourmis et puis aussi des gros. On en inventa des gentils comme les chatons et des méchants comme les serpents. Pourquoi des serpents allez-vous me dire ?
Les serpents, c’est pour faire peur aux méchants.

On inventa ainsi plein de choses, on inventa tout ce qui rend la vie belle, tout ce qui fait que les enfants sont contents et qu’ils le montrent en chantant.

Voilà, on avait passé plein de journées à tout inventer quand soudain quelqu’un fit remarquer que l’on avait fait une grosse erreur : on avait oublié de mettre des couleurs.
Le monde était comme l’une de ces vieilles photos, vous savez les photos en noir et blanc.

Ce n’est pas grave dit un autre. Le monde que nous avons créé est comme un gros album à colorier. Il n’y a qu’à sortir les pinceaux et les pots de peinture.

Alors comme des enfants bien sages, chacun se mit à l’ouvrage.
On mit de la peinture rouge sur les fraises pour qu’elles soient plus faciles à trouver. On fit les grenouilles en vert pour qu’elles puissent se cacher. On voulu peindre l’éléphant en bleu, mais il dit non. Un costume bleu ça fait grossir, faite moi plutôt un habit gris.

Et l’on mit plein de peinture, plein de peinture partout, même sur les bananes, plein de jaune pour dire que l'on peut les manger sans risque parce qu’il n’y avait pas d’os dedans.

Et quand vint le soir, les pots de peinture étaient presque vides.
Arriva timidement une petite goutte d’eau. Vous avez oublié de me peindre, moi, je suis sans couleur, je suis transparente, on ne me voit presque pas comment voulez-vous que les gens m’aiment ?

C’est vrai, on avait oublié la goutte d’eau et pourtant l’eau c’est très important, sans eau pas de fleurs, sans eau pas de fruits, sans eau pas de rivière aussi.

Alors on se tourna vers les pots de peinture. Ils étaient presque vides, je vous l’ai dit. Alors on prit délicatement dans chaque pot le reste de peinture et tout doucement, parce qu’une goutte d’eau c’est très fragile, on passa les pinceaux.

La goutte d’eau resta incolore, du moins en apparence, car quand elles se mettent en groupe, comme les jours de pluie, il suffit d’un simple petit rayon de soleil, pour que les gouttes d’eau se mettent à danser dans le ciel en dessinant, devinez quoi ?

Un très joli arc-en-ciel.





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