Brobeck Jean-Paul - Un miroir pour trois visages
La bouteille.

La vie est un grand livre avec des centaines de pages. Chacun vit de chapitre en chapitre. Et s’il est bon parfois de regarder en arrière, il faut aussi savoir écrire de nouvelles pages, ne pas ressasser le passé et se tourner résolument vers l’avenir.

Je ne sais même plus ni où, ni dans quelles circonstances, j’avais fait sa connaissance. Peut-être que cet homme vivait quelque part. Peut-être bien, qu’il n’est que le fruit d’un rêve, un soir de solitude.

Appelons-le Joseph, si vous le voulez bien. Je crois que Joseph avait occupé un poste important : président ou patron d’une grande entreprise. Toujours est-il, qu’il a connu la vie facile, les grands voyages, les repas dans les restaurants renommés. Je crois bien qu’il possédait un chalet en montagne, une villa au bord de la mer. Mais Joseph aimait par-dessus tout le vin. Il en possède une pleine cave.

Joseph était heureux. Mais qui possède la conscience du bonheur ?

Un jour, le ciel se couvrit de gros nuages. L’entreprise fit de mauvaises affaires. Joseph s’endetta. La femme sur qui il pensait pouvoir compter le quitta. Adieu aussi le chalet et la villa. Joseph vivait à sa manière l’histoire de Job.

Le bonhomme essaya de résister au désespoir. Il frappa à toutes les portes, mais personne ne le reconnut, personne ne daigna ouvrir. Alors, prêt à tout, Joseph fit appel au diable.

` “Satan, je veux bien te vendre mon âme, mais j’aimerais que tu m’exauces un dernier voeu. Je voudrais que tu m’offres une bouteille du meilleur de tous les vins. Quand je l’aurai bue, tu pourras venir me chercher.”

Le Malin apporta donc une bouteille du vin le plus capiteux. Joseph la déboucha et dégusta lentement un verre. Mais, au moment de ranger la bouteille, Joseph refit le plein, en rajoutant de l’eau.

Les jours passèrent. Il y a bien longtemps que l’eau a remplacé le vin. La bouteille ne se vidait point. Le Malin s’impatientait, mais il avait conclu un marché. Il se devait de le respecter.

Quant à Joseph, il apprit à ne pas regretter, à n’espérer que ce qui est possible, à vivre intensément chaque instant.

car seul le sage vit au présent.
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