Le dimanche
Quand jétais gosse, je naimais pas les dimanches. Certes, le dimanche cétait un peu de liberté, un repas un peu plus élaboré ; mais le dimanche, il fallait mettre le beau costume.
Voilà ce qui nallait pas. Ma mère et moi, nous assistions à la première messe, et quand je retournais, tout endimanché, avec ma chemise blanche et ma cravate, maman avait soin de me rappeler :
Fais attention. Ne te salis pas.
Que naurais-je donné pour remettre vite mes vieux habits, pour aller dans la cave, fendre des bûches ou bricoler avec mon père !
Non, mes dimanches à moi ressemblaient à une punition.
Attendre le soir qui nen finissait pas de venir.
Atteindre le soir, sans la moindre tache.
Quand jai quitté le nid, jai laissé mes costumes sur leurs cintres.
Le dimanche, je mettais mes plus vieux habits. Jétais heureux, les mains dans la terre, le corps couverts de copeaux de bois, dans mon atelier.
Bien des dimanches ont passé.
Qui sait ? Jai peut-être mûri.
Lautre jour, je discutais avec ma mère
Tu vois - me disait-elle -, les gens se punissent eux-mêmes. Même le dimanche, ils ne sarrêtent pas. Ils courent, on se demande après quoi ?
Dans le temps, le dimanche cétait une fête ; maintenant cest presque un jour comme les autres.
Aux jours de soleil, il faut des jours de pluie.
A la fatigue, le repos dune bonne nuit.
Aux jours de semaine, trop semblables trop gris; il faut des dimanches,
avec leur cravate et leur chemise blanche.
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