Trop, cest trop !
Trop, cest trop ! Je veux bien admettre que chacun possède ses petites manies, ses marottes, ses dadas, mais je demande, quen retour, on respecte les miens.
Me voici donc en colère. Mais contre qui ? Eh bien je suis en colère contre ce petit monsieur en habit noir ! Dans son habit de croque-mort, il prend un air hautain et me regarde dun air suffisant. Je veux parler du merle de mon jardin.
Merle, merle, joyeux merle ... dit la poésie. Cest vrai quun merle trouve sa place dans un poème, mais dans mon jardin, un merle, cela fait désordre.
Figurez-vous que mon merle à moi, doit être retraité des travaux publics. De toute façon anti-jardinier pour sûr. Je venais de planter des oignons de tulipes quand, à peine le dos tourné, voilà mon merle qui se met en tête de les déterrer.
Tiens, le merle cherche des vers ! Normal, pour un oiseau. Peut-être a-t-il faim ? Une famille à nourrir. Je pardonne donc et replante mes tulipes. Vous nallez pas me croire, le lendemain matin, le merle avait, sans la moindre gêne, remis à lair tous mes bulbes. Là, il nest plus question de faim. Cela doit être une manie, une obsession, voire un vice!
Le manège dure depuis quelques jours déjà. Je plante. Il déterre. Cest à qui se lassera le premier. Lautre jour, je bricolais dans ma cave. Javais laissé ma porte de la cuisine grande ouverte. Il faisait chaud. Quand je remontai, jai failli déraper. Mon merle avait laissé un souvenir de sa visite sous la forme dune tache dans laquelle il vaut mieux ne pas marcher !
Sen était trop ! Je suis allé en ville, acheter des plombs pour mon fusil. Je me mis à laffût, ayant opté pour la solution radicale.
Il arriva, comme de coutume, lair peu surpris de me trouver là. Il me dévisagea de son oeil noir brillant. Jy crus voir plus de malice que de méchanceté. Je nai point appuyé sur la gâchette.
Jai rangé mon fusil à labri des regards. Jétais fier de moi. Allez savoir pourquoi ? Que voulez-vous, mon merle continuera à ravager mon jardin.
Et moi, comme je suis un peu trop gentil, jirais peut être jusqu'à acheter des graines, pour mon merle, lhiver prochain.